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LUTTE CONTRE LES VIOLENCES SEXUELLES A L’EST DE LA RDCONGO : ENTREPRENEURS DE MOBILISATIONS ET DEVELOPPEMENTS INTERPRETATIFS

Par Bertin LUKANDA • Bibliothèque : REVUE M.E.S RIDSDroit • Article • 2023-05-10 • 111 vue(s)

CONCLUSION Il importe de prendre en compte les dimensions conjoncturelles et structurelles de la lutte contre les violences sexuelles à l’Est de la RDC, car les cadres interprétatifs de ces violences semblent mouvants. Ainsi, les mobilisations dans les années 1998 à 2003, alors que le Kivu était sous « occupation » des armées étrangères et des factions rebelles ne sauraient avoir le même sens socialement que les mobilisations des années 2007-2013, après la réunification du pays et la promulgation des Lois sur les violences sexuelles. Les violences sexuelles précitées sont survenues dans le contexte des années de « guerres d’agression » dans une perspective principale de résistance civile contre l’invasion du pays. Sous l’influence des acteurs internationaux, un travail symbolique a été fait, établissant un lien entre la recrudescence de violences sexuelles et un schéma global des « forces d’occupation » pour détruire la société congolaise en se servant d’« une arme de guerre » davantage redoutable. Cette interprétation collective de la problématique de ce phénomène a orienté très significativement le choix des stratégies de lutte développées et des réponses apportées jusque là. Le constat du recours aux crimes de violences sexuelles par des éléments de l’armée nationale, par les miliciens nationaux, par les combattants congolais démobilisés et les civils opportunistes de tout bord, en dépit de l’existence des Lois renforçant la répression en matière de violences sexuelles et de la pacification relative dans plusieurs territoires, a fait évoluer le regard, les discours et la définition attribuée aux violences sexuelles à l’Est du pays. Une grande majorité d’entrepreneurs de mobilisations les considèrent désormais soit comme une pratique soit comme la conséquence de la faible autorité de l’Etat et de la forte impunité. Si certains groupes en lutte ont continué à les conceptualiser comme « arme de guerre », ce serait plus pour faire une mauvaise publicité des acteurs impliqués dans les conflits et pour interpeller la conscience de la communauté internationale sur son obligation d’agir efficacement et durablement en vue de venir à bout de la crise qui perdure plutôt que pour soutenir que ces violences sont commanditées ou institutionnalisées. Malgré la différence et l’évolution de perspectives, les discours privilégiés visent davantage la dénonciation de l’ignominie de ces crimes et expriment l’idée de la nécessité et l’urgence de prendre des mesures pour arrêter le mal et soulager les victimes. Mais il se trouve que les réponses apportées n’accordent que très faiblement l’attention à la promotion des meilleures relations entre les structures étatiques viables et la société. La persistance des violences sexuelles à l’Est de la RDC, que ce soit dans le cadre des opérations militaires ou qu’il s’agisse de crimes d’opportunités, en dépit des engagements de la société civile, de la Communauté internationale et des autorités congolaises reste l’indicateur majeur de ce que la crise dans cette partie du pays est une situation permanente. Elle révèle l’inefficacité des outils nationaux et internationaux de réponses à celle-ci. Un regain de violences sexuelles est toujours possible tant que des paramètres importants de la crise liés à la fragilité politique et sociale de l’Etat ne seront pas résolus, entraînant encore et toujours des effets dévastateurs sur les femmes et les communautés.


Autres Détails

Bertin LUKANDA
Assistant à l’Université du Moyen Lualaba/Kalima-RDC
Doctorant à l’Université Catholique d’Afrique Centrale /Yaoundé-
Cameroun


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